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tetierecannes2003
PORTRAIT. Claire Doyon - Réalisatrice des «Lionceaux»
Dans le vent
Par Annick PEIGNE-GIULY

vendredi 23 mai 2003


 
 
 

«Exécuter un scénario, aux deux sens du terme, ça ne me ressemble pas du tout.» Claire Doyon
 

n peu ébouriffée devant son café serré, Claire Doyon, 32 ans, a le regard du Petit Poucet tout juste sorti de sa forêt. Encore un reste de peur, mais pas peu fière d'avoir su se guider avec ses propres petits cailloux. Après deux années d'un tournage à l'arraché, la cassette de son premier film, les Lionceaux, a été envoyée comme une bouteille à la mer à la Quinzaine des réalisateurs et sélectionnée. «Je crois que ça a sauvé le film, dit-elle de sa voix menue. Sinon, je ne sais pas si nous aurions pu le terminer...» En deux ans, trois producteurs se sont succédé, le budget s'est sérieusement réduit et les soixante pages du scénario n'ont cessé d'être rebidouillées... Après ce tournage en tangage, Claire Doyon aborde Cannes, avec un délicieux mal de terre.

«Cadre idéal». A peine sortie de la Fémis il y a deux ans, la frêle jeune femme s'était jetée dans ce projet qui la ramenait à Sète, à deux pas de sa famille. Des protestants descendus des Cévennes. Déjà, en 2000, dans son film d'étude, elle y avait filmé la longue veillée mortuaire d'un grand-père. Est-ce à cette occasion que sa grand-mère lui a demandé à quoi servait le cinéma ? «A rien», a répondu Claire Doyon de sa voix de petite fille. «Si jamais tu en fais quand même, il faut que tu appelles Godard, lui aussi il est protestant», a conseillé la grand-mère. Mais le titre du film était déjà une réponse : Le vent souffle où il veut. Le credo de cette souris brune à l'oeil scrutateur. Son dogme ?

Ce n'est qu'à 25 ans qu'elle s'intéresse au cinéma. Etudiante en lettres, elle sait que, dans l'écriture, pour elle, «il manque la vie et le mouvement». Elle présente donc la Fémis. «Au deuxième coup, je suis reçue. Ce fut un luxe total pendant trois ans. L'idée de l'échec n'y existe pas. La Fémis est un cocon surprotégé, un cadre idéal de production. Là, j'ai commencé à pratiquer le cinéma en même temps que je l'ai découvert.» A la sortie, la jeune présomptueuse file, scénario en main (l'histoire de deux filles sauvages et d'un Robinson), dans un domaine au bord de l'étang de Thau, filmer son conte de fées musical comme on part sur une île déserte. «En fait, ce film, je ne l'ai jamais imaginé globalement. J'ai écrit un scénario et c'est après que s'est inventé l'univers du film. Un univers pas réaliste du tout.»

Elle découvre les cruautés de la production. Rien ne l'arrête. Elle en fait même son miel. «Ces contraintes économiques m'ont obligée à des réécritures successives, à supprimer des personnages. Cela a resserré l'intrigue, l'histoire est devenue squelettique. Et, du coup, cette comédie s'est faite plus oppressante.» Elle demande aux acteurs et aux techniciens de travailler au film comme elle. En inventant au fur et à mesure du tournage. «La costumière a proposé que tous les costumes soient en soie. Et c'est devenu une composante importante du film... La soie qui bouge au vent.» Une ambiance de studio qui en déroute certains, où elle tient à ce que chacun puisse lancer une idée, jusqu'à la dernière minute. «Pour impressionner sur la pellicule quelque chose de vivant, d'imprévisible. Exécuter un scénario, aux deux sens du terme, ça ne me ressemble pas du tout.»

«Humeurs». Une fragile méthode de travail qui ne rassurait évidemment pas les producteurs. Qui mettait perpétuellement en danger les comédiens. «Même pour les chansons, il n'y avait pas de mélodie au départ. Ce sont des improvisations, enregistrées en direct, au gré du climat, des humeurs. Alors que la production voulait une partition.» Dans cette presqu'île déserte, Dani et Jacno (les parents des deux soeurs) et les trois autres jeunes acteurs se sont laissés aller au gré des trois vents qui soufflent là. La tramontane, le mistral et un autre qu'on appelle le vent des fous. C'est celui-là qui les a tous emportés, avec Claire Doyon. «J'ai envie que ce film ressemble à du vent.».

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